Les relations amoureuses ne sont pas toujours rose bonbon ou bleu ciel. Non, elles sont parfois ternies par les nuages gris représentant la jalousie, l’incertitude et la peur. Avec Escape Journey on découvre le début d’une histoire charnelle devenant très vite compliqué de par les émotions que les personnages viennent à ressentir.
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Lire un extrait du tome 1 ici
Merci à Guillaume pour cette découverte qui ne laisse pas indifférent
Tanaka Ogeretsu est une mangaka spécialisée dans les boys love dont le premier manga, Yarichin Bitch Club, paru au Japon en 2012 (et toujours en cours), paraîtra en France aux éditions Taifu Comics en janvier prochain. Elle écrit à la fois des séries tenant sur plusieurs tomes que des one-shots. Dans cette catégorie on retrouve Love Whispers, The proprer way to write love, et Neon Sign Amber. À noter que ce dernier paraîtra en français chez Taifu également, ce 26 octobre. Outre Yarischin Bitch Club, dans les séries régulières il y a Lonely to Organdy (5 tomes terminés – inédit en France), et Escape Journey toujours en cours de parution au Japon et en France.
Escape Journey ouvre sur la dispute et la rupture du « couple » Taichi et Naoto. Si le premier voyait plus sa relation avec le deuxième comme étant une simple « histoire de c*l » , Naoto lui le voyait comme son petit ami. Un an plus tard, lors de son entrée en fac, Naoto recroise sur son chemin Yashin, puisqu’il vient lui aussi d’intégrer cette même fac alors qu’il se destinait à des études scientifiques et non littéraires. Ne sachant comment être amis, Naoto et Tachi vont retomber dans les bras l’un de l’autre assez rapidement. Si cela vient à troubler Naoto qui voit ses sentiments passés refaire surface, le discret Taichi lui ne semble pas vraiment s’en soucier.
Pour parler de Escape Journey, je préfère prévenir tout le monde en disant que c’est un yaoi avec pas mal de scène sexuellement très explicites. Si je pensais n’en avoir qu’une ici et là, le tome 1 en contient pas moins de six ce qui, pour moi, est beaucoup sur 256 pages. Du coup, j’ai trouvé que l’histoire perdait de sa valeur émotionnelle et donnait trop dans l’érotisme gratuit. Je ne dis pas que les relations qui débutent par le sexe n’existent pas, on sait tous que oui, mais comme dans chaque récit que ce soit en roman ou en manga, quand cela est trop présent, j’ai plus de mal à me sentir une connexion avec les personnages. Comme je suis sur les points négatifs, j’ajouterais qu’une scène en particulier m’a vraiment fait grincer des dents. C’est le genre de moment que j’ai du mal à cautionner dans la fiction et dans la réalité. Donc oui, la motion « pour public averti » n’est pas là pour faire joli, non, elle s’applique, et je suis bien contente que Taifu Comics l’ait mise.
Voilà, maintenant que les points moins agréables ont été évoqués, je vais pouvoir vous parler du positif. Parce que oui, il y a de très bonnes choses dans Escape Journey. Tout d’abord, il y a les personnages, notamment le duo Naoto et Taichi qui sont deux total opposés. Naoto est plutôt enjoué, souriant, extraverti et très sociable. Alors que Taichi est plus taciturne, colérique, et introverti. Si la mangaka fait en sorte d’écrire ses personnages de manière à coïncider avec leurs personnalités, elle n’oublie pas de les faire évoluer. Ainsi, dans le tome 1, le lecteur découvre une relation compliquée, charnelle, voir presque incontrôlable entre deux jeunes hommes en fin d’adolescence qui se cherchent sur plusieurs niveaux. Sexualité, épanouissement personnel, vie future, liens familiaux, chacun de ses points importants est présent. Du coup, je me suis sentie frustrée d’avoir ce trop-plein de scènes érotiques, car le scénario de base et les sentiments sont bien là et très prometteurs sur la durée. Le récit est poétique et violent sur plusieurs plans, ce qui fait qu’il est difficile de rester indifférent à la lecture de ce tome 1.
Après avoir terminé ce premier tome, j’étais vraiment inquiète de découvrir la suite. Allait-il y avoir encore autant de scènes de sexe ? D’autres moments violents ? Eh bien, non. À mon grand étonnement et soulagement, le tome 2 de Escape Journey est plus mature que le premier. Il est à l’image de Naoto et Taichi puisque dès les premières pages on apprend que cela fait trois ans qu’ils sont ensemble. La fac se termine, il est donc temps de penser à ce que l’on va faire ensuite. Continuer ses études ou bien entrer dans le monde du travail ? Cette question est l’une des deux lignes scénaristiques que va explorer Tanaka Ogeretsu. La deuxième est en relation avec le couple et la vie à deux. Comment avouer à sa famille que l’on sort avec un autre homme quand eux s’attendent à vous voir arriver avec une femme tenant votre main ? C’est délicat et difficile. Et c’est avec sincérité et panache que la mangaka expose chaque sentiment, peur et incompréhension qui accompagnent cette question. Dans l’entourage du couple personne ou presque n’est au courant pour eux, seule Fumi le sait. Présentée dans le premier tome, elle craquera très vite pour Taichi, et essayera avec la complicité d’une amie et de Naoto (encore incertain de sa « relation » avec Taichi) de se rapprocher de lui. J’ai beaucoup aimé son personnage, sa clairvoyance et les bons conseils qu’elle apporte dans les moments où elle est présente. Du coup, j’ai trouvé que c’était dommage de ne pas la montrer un peu plus, sa maturité faisant du bien à lire. Contrairement à leur immaturité – qui va avec l’âge – dans le premier tome, Naoto et Taichi se révèlent plus réfléchi dans leurs actions, leurs sentiments et beaucoup plus adulte. Un trait important qui donne vraiment une dimension nouvelle au récit. C’est comme si on découvrait le récit à nouveau, repartant sur des bases qui m’ont fait oublier les défauts des débuts. À noter que si ce tome deux présente encore des scènes pour public averti, elles ne sont plus qu’au nombre de deux, ce qui laisse le récit respirer.
Pour compléter mon avis sur les différents thèmes abordés ici, le tome deux nous met face aux regards de la société et des proches sur les relations LGBTQ. Parce que si Taichi et Naoto sont ensemble, à aucun moment il n’est mentionné qu’ils sont gays. D’ailleurs, si Taichi est plus discret sur ses relations, Naoto ne s’est jamais caché d’avoir été avec des filles. On comprend donc très vite qu’ici ce qui prime ce sont les sentiments peu importe le sexe de celui que l’on aime. J’ai trouvé cela vraiment très bien amené, c’est bien écrit et très parlant. On explore aussi la part de confiance et de jalousie au sein d’un couple, avec l’arrivée de Nishina un étudiant en droit dont le passé l’a changé au cours des années. Ce personnage est plus sombre, presque torturé, et surtout blessé à cause d’une relation précédente. Les scènes de flashbacks revenant sur lui sont très intenses, et on compatit très vite à son sort.
La partie graphique est sans reproche. C’est extrêmement bien dessiné, moderne et vraiment communicatif. Ce détail s’applique également aux scènes hot, oui. Ce n’est pas choquant mais si vous n’avez pas l’habitude des dessins érotiques, cela peut surprendre au début. Le trait de Ogeretsu est maîtrisé et bluffant, notamment sur les regards des personnages qui transmet tout de suite au lecteur ce qu’ils ressentent. Il y a également le détail des mains mises en valeur qui est en lien direct avec les émotions (nervosité, choc,…) de chacun. L’édition de Taifu Comics est toujours de qualité. La traduction et soignée et respecte aussi bien les dialogues un peu plus crus que ceux plus vibrants d’émotion.
En conclusion, Espace Journey est une lecture à essayer malgré les défauts que je lui ai reprochés sur le premier tome. Pourquoi ? Car il serait regrettable de ne pas découvrir cette histoire qui gagne en maturité et réflexion sur la société face à la différence. Je pense que ce récit peut plaire comme déplaire, mais que personnellement je suis contente d’avoir eu l’occasion de découvrir surtout quand on voit les idées qui dorment sous la surface et qui éclosent enfin dans le tome 2 pour nous offrir quelque chose de fort. Très fort même.
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