Sous l’énigmatique Q Mysteries se cache un scénario sur le même pied d’égalité qu’un Dan Brown ou d’un Tru Detective pour les amoureux du petit écran. Écrit avec le souci du détail et de proposer un récit fort et intelligent, Keisuke MATSUOKA réussit à donner naissance à une héroïne au talent d’experte en supercherie et co. aussi redoutable qu’un Cerbère surveillant les portes des Enfers. Le rythme est effréné, le contexte politique, économique et social est maîtrisé du début à la fin.
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Également disponible en version numérique sur izneo
LIRE MON AVIS SUR LES TOMES 1 ET 2 ICI | LIRE UN EXTRAIT DU TOME 1
Q Mysteries est un seinen écrit par Keisuke MATSUOKA, auteur du light novel Bannou Kanteishi, dont l’adaptation en manga trouve son origine. Le dessin est assuré par Chizu KAMIKO, dont Q Mysteries fût le premier travail. On le retrouve ensuite aux planches de Are You Alice ? Anthology (2013), Shikabane Shoujou to Kakanai Gaka (2015) et l’année dernière sur Kabukibu!. La conception des personnages est signée Hiro KIYOHARA, mangaka japonaise dont la majorité de ses œuvres sont destinées à un un public friand de surnaturelle et d’horreur. Sa carrière , elle, la débuta en tant qu’artiste sur Mad World – Holiday, Mad World – Inner Voice, et Mad World – Wounds disponibles en français. En 2008, elle signe son premier et unique titre à ce jour, en auteure uniquement, Tsumitsuki et Another, aux éditions Pika.
Q Mysteries est un manga fini en 10 tomes aux éditions Kana dans la collection Big Kana, avec une adaptation cinématographique datant de 2014 par Uda Manabu (Lucky Seven, Tokyo Airport).
Après deux premiers tomes [mon avis ici] plantant habilement le contexte du manga, le tome 3 de Q Mysteries s’ouvre sur LA plus grande crise financière du Japon aux répercussions désastreuses sur le long terme. En effet, avec l’introduction de faux billets de banque impossible à différencier des vrais, la bourse vole en éclat, les loyers deviennent faramineux, le yen est refusé et remplacé par le dollar, et même le prix matières premières prend l’ascenseur jusqu’à atteindre une somme à en faire pâlir l’amoureux du lait qui devra débourser 70 euros pour un litre! Et pendant que le gouvernent se creusent les méninges pour trouver une solution, la talentueuse Riko Rinda se rend sur son île natale afin d’y trouver des indices sur le maître graveur du gouvernement responsable de la fabrication des billets. Au Japon, Yûto Ogasawara poursuit son travail de journaliste et se voit accorder le droit de faire un papier sur ce qui se passe. Il rejoint vite donc sa nouvelle partenaire sur l’île. Ce troisième tome reprend les ingrédients qui ont fait que le lecteur sera complètement pris dans le scénario judicieusement bien ficelé de Keisuke MATSUOKA. Est-ce que ce scandale des faux billets a un lien direct avec les vignettes sumo collés dans les rues de Tokyo ? Le coupable est-il celui que tout le monde recherche ?
De nombreuses questions qui sauront trouver une conclusion à la fin du tome, sans que cela ne paraisse précipité. Les rebondissements sont nombreux malgré quelques facilités scénaristiques mais en aucun cas péjoratif. En fait, outre ce scénario digne d’un polar de haute volée, le plus dingue dans ce manga est la quantité d’informations précises sur tel ou tel sujet (objet, fabrication, aliment, etc.) donnant une intelligence folle aux enquêtes. Je n’ose même pas imaginer le travail que le mangaka a dû effectuer… Au fil des chapitres, les indices s’amoncellent et on prend plaisir à suivre notre petit binôme. Riko reste le véritable atout de Q Mysteries en mettant son talent d’experte (limite mentaliste) au service de la société. Oui, imaginez si elle avait plutôt opté pour le pouvoir obscur de la force…. elle aurait fini par ruiner le Japon à elle toute seule ! Si de son côté Yûto n’est pas des plus actifs sur le terrain, ne possédant pas la vision de sa collègue, sa présence morale est importante pour la jeune fille dont les souvenirs de son passé la mine quelque peu.
Le tome 4 part sur une nouvelle enquête, permettant ainsi au scénariste de montrer toute l’étendue du talent de Riko. Après un incendie, la jeune femme se voit confier une mission d’infiltration afin de coincer une grande arnaqueuse, Karen Amamori, que les forces de l’ordre ont du mal à coincer tant elle est devenue une manipulatrice qu’aucune preuve ne vient accabler. Ce nouveau personnage apporte une tension palpable puisque ses capacités intellectuelles sont du même niveau que celle de Riko. Charismatique, énigmatique, sournoise et insaisissable, elle mettra bien à mal Riko dont le masque ne peut tomber. On assiste un peu à un jeu du chat et de la souris, ou clairement c’est le chat qui a le dessus…
Après une mise en place frustrante mais proche d’un duel Sherlock versus Moriarty, le cinquième tome de Q Mysteries se transforme en une véritable course contre la montre. Réalisant qu’elle a perdu du temps avant de comprendre la nature des petits tests concoctés par sa rivale, Riko n’a plus une minute à perdre pour arriver à arrêter Karen. Toutefois, la faussaire hors pair prouvera qu’elle n’est pas une débutante en ayant à chaque fois un coup d’avance sur notre experte de choc. Avec une telle narration, le lecteur est captif du récit de MATSUOKA. Riko arrivera-t-elle à démasquer à temps Karen ? Surtout que cette dernière n’est pas seule…
Le dessin de Chizu KAMIKOU est harmonieux, mettant l’accent sur le dynamisme de la mise en scène et sur le charadesign des personnages aux expressions variés. Les émotions de Riko jouent beaucoup sur l’attachement qu’on éprouve pour elle depuis le premier tome. Les similitudes existantes entre Riko et Karen existent également au niveau physique. On peut supposer que cela a été volontaire de la part de l’artiste pour rester au plus proche de cette dualité entre les deux écrite par MATSUOKA. Les décors ne sont pas en reste puisqu’ils complètent bien l’atmosphère imposée par le scénario. En particulier dans le tome 3, où le passage entre la ville agitée de Tokyo et le paysage calme de l’île de Okinawa sont frappants. L’accent porté sur le champ de vision de Riko est aussi vital, puisque l’on peut facilement comprendre ou son intention ce porte. Depuis le temps, le travail d’édition de KANA n’est plus à prouver, et comme pour les deux premiers tomes, on peut retirer son chapeau et faire un standing ovation à la traduction de Pascale Simon (Black Butler, Kamakura Diary, Deadman Wonderland, Trinity Blood, etc).
En conclusion, ces trois tomes de Q Mysteries sont encore plus prenant que les tome 1 et 2. Le scénario aux multiples ramifications de Keisuke MATSUOKA nous retourne et nous surprend. Le rythme est frénétique, calme dans les moments de réflexion et plus sombre quand l’action monte en intensité. Le lien Riko / Yuto se resserre et offre des moments tendres en complicité. Et difficile de ne pas partager le visage de béatitude de Yuto face au talent sans limite de notre experte. Allez, maintenant rendez-vous dans une nouvelle enquête nous emmenant cette fois-ci en France ! À vos petits pains les cocoricos!