Critique BD #022 – Le Boiseleur, tome 1 : Les Mains d’Illian

Titre page BD (2)

« En ces temps fort lointains habitait dans la ville de Solidor un jeune apprenti sculpteur du nom d’Illian » … C’est avec cette simple phrase que Le Boiseleur nous transporte dans un temps fort lointain sans que l’on ne sache réellement à quelle époque nous nous trouvons. L’art du bois et toute la minutie qu’il faut pour créer des oeuvres immobiles mais qui pourtant respirent la vie font de cette histoire un conte doux porté par des thèmes fort et une critique de notre société, sans pour autant tomber dans la moralisation agressive et repoussante.

 

Disponible aux éditions Soleil dans la collection Métamorphose ou sur Amazon au prix de 19.99€ | Également disponible au format numérique | LIRE UN EXTRAIT ICI

2


La collection Métamorphose des Éditions Soleil proposent de découvrir des récits uniques tels des contes anciens qui se mêle à une forme de poésie qui communique aussi bien par les mots que par le dessin. Le scénario de Le Boiseleur est signé Hubert à qui l’on doit Les Legs de l’Alchimiste avec Tamquerelle puis Benjamin Bachlier, Les Ogres-Dieux également dans la collection Métamorphose et puis Miss Pas Touche en 2006 dessiné par les Kerascoël. Pour ce premier tome intitulé Les Mains d’Illian le scénariste fait équipe avec l’artiste Gaëlle Hersent qui a aussi bien de l’expérience dans le dessin sur papier que dans le domaine de l’image animée. Récemment elle œuvre dans les milieux de l’édition jeunesse et de la bande dessinée: Sauvage, roman graphique écrit par Jean-David Morvan.

Comme le laisse entre le titre et la couverture, nous faisons la connaissance d’Illian un apprenti sculpteur en bois qui fait son apprentissage chez le sans cœur Maître Koppel. Ce dernier n’hésite pas à se mettre en retrait et à charmer les clients pour qu’ils achètent pendant que le jeune homme se coltine tout le travail. L’atelier se trouve dans une charmante petite ville, Solidor, où les habitants ont développé une passion pour les oiseaux exotiques, et où chaque maison comporte au moins un oiseau dans une cage en bois taillé par les mains d’Illian. À défaut de pouvoir en acheter un, Illian adore écouter les mélodies des oiseaux sans jamais se lasser. Mais un soir alors qu’il fignole un rossignol de bois, il se fait prendre par son Maître qui va offrir l’oiseau à sa fille. Mais tous trois sont loin d’imaginer que cette nouvelle œuvre va changer la ville…

Hubert et Hersent joignent leur talent pour offrir au lecteur un conte comme ceux écrits, jadis, par les frères Grimm. L’ambiance et la narration nous portent avec simplicité et charme. C’est doux et imagé telle une histoire pour enfants, et plus terre-à-terre en abordant en sous-texte la faune et la flore, l’effet de mode et la consommation de masse, et l’importance de respecter et protéger cette Terre qui est la nôtre. Toutefois, que les plus réfractaires se rassurent, le récit ne prend jamais un ton moralisateur mais plutôt un ton neutre nous laissant tirer une éventuelle morale. Les personnages nous rappelant forcément les héros et vilains de contes comme on les connaît sans réellement s’empourprer dans une caricature qui aurait desservi l’ouvrage. Koppel est un homme imposant par son caractère et sa corpulence qui n’hésite pas à jouer sur la peur pour faire plier Illian à ses requêtes. Le sentiment d’impuissance que ressent le jeune apprenti est facilement repérable et communicatif pour que le lecteur puisse compatir à sa cause. Sage et travailleur, Illian est également un rêveur qui sait vivre du peu qu’il a sans jamais perdre espoir que l’avenir sera différent et lumineux. Les oiseaux sont la seule faune présente dans le scénario mais cela est bien suffisant. Il y en a tant et tellement différent des uns et des autres, que l’on se laisse capter par l’imaginaire qui en ressort. Nul doute que Hubert et Hersent ont su s’inspirer des oiseaux réels et les fusionner les uns aux autres pour créer de nouvelles espèces. Colorés, bruyants, majestueux, fragiles, il y en a vraiment pour tous les goûts. Le rythme de narration ne souffre ni de lenteur ni de précipitation. Le lecteur est facilement porté par ce qui se passe sur les pages. D’autre part, ce tome 1 se suffit à lui-même, alors pas de crainte.

Ce diaporama nécessite JavaScript.

Cela passe énormément aussi par le trait de Gaëlle Hersent qui accompagne le scénario d’Hubert, et où les deux supports se marient subtilement pour donner une histoire pleine de charme. Des illustrations de pleines pages accompagnées d’encarts de textes ni trop longs ni trop courts. Le talent de la dessinatrice jaillie des pages pour nous émerveiller tant l’imaginaire, le souci du détail et la couleur forment un ensemble tendre et calme comme si l’on respirait l’air vivifiant de la campagne. Le style de Gaëlle Hersent insuffle la vie aux personnages à l’image de la fée animant le petit Pinocchio. C’est sinueux, léger et fort à la fois. Possible que chaque lecteur ressente des sensations différentes en ouvrant et lisant cet ouvrage. Mais, personne ne peut nier que Hersent brille d’un talent unique et tellement familier en même temps, que la nostalgie nous gagne. On peut mentionner le choix d’avoir voulu représenter le chant des oiseaux par une lignée de fumée rappelant la traînée de parfum que peut laisser quelqu’un derrière lui.
L’album en lui-même est à l’image de la qualité du reste de la collection Métamorphose. Solide, format franco-belge, dorure, reliefs, etc. Un travail minutieux de la part de l’équipe en charge d’offrir un écrin à la hauteur de l’histoire elle-même.

En conclusion, par sa simplicité, sa délicatesse, ses thèmes matures et son dessin rappelant les contes merveilleux d’autrefois, Le Boiseleur devient mon premier coup de cœur de 2020, et je ne peux qu’en être ravie. Une petite perle au graphisme et à la sensibilité séduisante portée par le talent de Hubert et Hersent.infos comics

3 réflexions sur “Critique BD #022 – Le Boiseleur, tome 1 : Les Mains d’Illian

    • Je ne me peux que te la recommander. Je lis très peu de BD, mais celle-ci a été une vraie petite pépite. J’ai vraiment hâte de voir ce que peux donner la suite, et si on va retrouver les mêmes personnages. En tout cas ce tome 1 se suffit a lui-même.

      J’aime

  1. Pingback: Le Boiseleur, 1 – Les mains d’Illian de Hubert et Hersent – PatiVore

Laisser un commentaire