Critique BD #012 – Mausart de Thierry Joor & Gradimir Smudja, Les petites cartes secrètes de Anaïs Vachez & Cyrielle

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Aimez-vous la musique classique ? Aimez-vous les contes ? Que vous répondiez négativement à la première et positivement à la seconde importe peu, puisque « Mausart » arrivera à vous séduire par sa bienveillance et son trait aussi gracieux qu’une souris qui se faufile dans un trou. « Les petites cartes secrètes » est une bande dessinée se déroulant dans les années 90, où les références à cette époque raviront les lecteurs qui les ont connus. Le message derrière ce titre est à mile lieu de ce que vous imaginez en ouvrant cet ouvrage. Deux lectures pour petits et grands, de 7 à 90 ans.


Disponible aux Éditions Delcourt dans la collection Jeunesse au prix de 14.50€ | Amazon | LIRE UN EXTRAIT ICI 

Mausart est une bande dessinée scénarisée par Thierry Joor (directeur littéraire de Delcourt) avec Gradimir Smudja (Vincent et Van Gogh, Le Cabaret des muses, Au fil de l’art, etc.) au dessin et à la colorisation. En partant d’un simple jeu de mots (et d’une idée soufflée par Smudja), l’histoire du compositeur de musique classique Mozart, se transforme en Mausart pour envoûter petits et grands. Le récit est celui de Wolfgang, jeune souriceau qui rêve d’avoir son propre piano. Pour combler ce manque, il vit avec ses parents, frères et sœurs, dans le piano de Salieri, le loup pianiste à la cour du roi et de la reine d’Autriche. Alors que Wolfgang pense être seul et pianote avec joie sur les touches blanches et noires de son instrument favoris, les notes mélodieuses de sa musique se font entendre dans les rues de Vienne. Très vite, le roi qui passe en calèche annonce qu’il souhaite que Salieri, qu’il prend pour le véritable auteur de la musique, se produise demain soir lors de l’anniversaire de son épouse la reine. Sachant pertinemment qu’il ne peut rejouer ce qu’il ne connaît pas, Salieri demande à son domestique Ligo, le chat, de découvrir qui en est l’auteur et l’obliger à être à son service. Dès les premières pages, voire même dès la couverture, on sent que Mausart va nous embarquer dans une aventure musicale douce portée par le trait de Gradmir Smudja. Et on ne se trompe pas.

© 2018 Éditions Delcourt

Le scénario de Thierry Joor reprend Mozart et l’univers classique, pour offrir un merveilleux support au dessin de Smudja. Le récit possédant plusieurs degrés de lectures, plaira aussi bien aux grands qu’aux petits lecteurs. Et pourquoi pas une lecture commune entre parent et enfant ? Personnellement, je l’ai partagé du haut de mes 30 ans avec ma mère de 62 ans, qui ne lit absolument jamais, et qui a été émerveillée par les personnages, le style et le charme du scénario. Un moment que je vais chérir pendant de très nombreuses années, je vous le dis. Le fait d’avoir opté pour une galerie de personnages animaliers en costumes d’époque est un atout séduction indéniable. Les pages se tournent et on admire de voir ses animaux (lion, oie, cheval, girafe, etc.) partager les cases que le trait de Gradmir met brillamment en scène. Le souci du détail impressionne et force le respect. Le décor est extrêmement bien travaillé, avec une mise en couleurs à la peinture tendre et aussi envoûtante qu’un conte. Le travail d’édition des Éditions Delcourt est soigné et propre. En conclusion, Mausart est une histoire qui nous berce du début à la fin, avec un scénario de Thierry Joor de taille à mettre toute la lumière sur le grand talent de Gradmir Smudja.

17/20

Couverture Les petites cartes secrètesDisponible aux éditions Delcourt dans la collection Une Case en Moins au prix de 17.95€ | Amazon | LIRE UN EXTRAIT ICI | VOIR LE TEASER VIDÉO ICI

Les Petites Cartes Secrètes est scénarisé par Anaïs Vachez, (également réalisatrice des courts-métrages Le Petit Monstre, La Fille Accordéon, Little Doll et Il était une fois…) et aussi autrice et illustratrice des Contes de Nina. Au dessin nous avons Cyrielle qui depuis toute petite adore les BD, et décide de se lancer dans le métier après avoir découvert le manga Sailor Moon de Naoko TAKEUCHI. Elle est illustratrice jeunesse depuis plus de 10 ans, mais aussi autrice. À l’origine Les petites cartes secrètes est un blog, qui a été très suivi et relayé sur internet [lien ici]. Ensemble, elle donne naissance à une histoire qui se déroule au début des années 90 quand le Club Dorothé, les animes/mangas, walkman et autres souvenirs de cette époque rythmaient le quotidien. Depuis le divorce de leurs parents, Tom et Lili, ne vivent plus sous le même toit. Afin de pallier le manque qu’il ressente, et aussi pour tenter de faire que papa et maman retombent amoureux, ils s’échangent des cartes postales en mettant au point des plans “d’attaque”. Outre le cadre des années 90, l’originalité du récit passe par le système de narration qui alterne entre cases de BD et cartes postales. L’idée est poussée jusqu’au bout en incluant les fautes d’orthographe des enfants qui ont moins de 10 ans. On se laisse très vite séduire par l’ensemble et la personnalité des enfants. Tom est un grand frère qui même loin pousse sa petite sœur à tenir le coup, quand celle-ci voit sa maman tomber en dépression. La petite Lili est également victime de harcèlement scolaire, ce qui l’isole encore plus. On ressent vraiment sa solitude. Les parents, eux, tentent de reconstruire leur vie. Le papa à nouveau en couple ne comprend pas que son fils n’accepte pas sa nouvelle compagne. La maman, elle, est bien trop dépressive et centrée sur sa propre peine pour remarquer sa fille, dont les notes dégringolent. C’est assez troublant d’assister à cela, tant la réalité est frappante. L’imagination des enfants concernant les plans qu’ils mettent au point sont farfelus, innocents et parfois cruels.

© 2018 Éditions Delcourt

Le fait que Tom et Lili ne souhaitent que retrouver leur vie d’avant et reformer une vraie famille, révèle toute l’impuissance qu’ils peuvent sentir. Surtout qu’ils ne semblent pas avoir le droit de s’appeler ni de rester en contact. Pourquoi ? C’est une question qui apparaît très vite dans l’esprit du lecteur, et qui je vous rassure trouve réponse. Le ton réaliste du récit flirte en l’humour et le dramatique, jusqu’à atteindre un sommet poignant de sensibilité parfaite. On apprécie aussi les dizaines de clins d’œil aux années 90 qui raviront ceux qui les ont connu. Le dessin de Cyrielle est simple mais très joli. Le visage rond des personnages met bien en valeur leurs émotions. Les couleurs sont douces dans un ton pastel qui est un régal pour les yeux. La mise en page vogue entre le classique et le dynamique, avec comme je l’ai dit cette incrustation des cartes postales. En conclusion, Les petites cartes secrètes s’avère être un album pour petits et grands, où les parents pourront réaliser que dans une séparation ils ne sont pas les seuls à souffrir. En plaçant cette histoire dans les années 90, Anaïs Vachez et Cyrielle communiquent un drame aussi vieux comme le monde, qui au final s’il avait été décidé de l’écrire à l’ère des smartphones n’aurait pas du tout eu le même impact. Une lecture magnifique du début à la fin, bravo Mesdames !

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9 réflexions sur “Critique BD #012 – Mausart de Thierry Joor & Gradimir Smudja, Les petites cartes secrètes de Anaïs Vachez & Cyrielle

  1. oh ! J’avais déjà noté Mausart dans ma liste d’envie, tu me donnes encore plus envie de le lire. Les petites cartes secrètes n’est pas en reste, un retour dans les années 90 ne me ferait pas de mal 😉

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    • Yay! Contente que tu es aimé ? C’était court donc pratique quand on ne lis pas beaucoup ou pour les enfants. Depuis j’ai lu avec elle Charlotte Impératrice 1 et elle a beaucoup aimé aussi. Et Les petits carrés secrètes aborde des sujets plus sombres mais tellement vrai quand il s’agit des séparations avec les enfants au milieu. Et j’ai adoré toutes les références aux années 90 avec dragon Ball etc

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