Critique de Film #004 – Birds of Prey (et la Fantabuleuse histoire de Harley Quinn) 2020

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Harley Quinn campée par une Margot Robbie plus qu’en forme qui peut enfin montrer qui est la véritable Harleen. Je vous aide, ce n’est pas celle de Suicide Squad par David Ayer. Action précise et travaillée, chorégraphies au top, humour, fun, coloré, séduisant, Birds of Prey (et la Fantabuleuse histoire d’Harley Quinn) arrivera-t-il à vous charmer ? 

Depuis maintenant une décennie, les adaptations de comics sont légion. Du petit écran au grand écran de cinéma, il semble que ces personnages faits de traits de crayons et de couleurs aient réussi à prendre une place dans nos vies. Si certains comme Steven Spielberg et autres grandes têtes d’Hollywood n’hésitent pas à critiquer le genre, il ne faut pas oublier qu’au final ce sont les spectateurs qui influencent la demande. Marvel Studios, Warner Bros., et Sony Pictures essayent chacun de donner vie à ces personnages imaginaires qui ont su conquérir des millions de lecteurs à travers le monde depuis près de 80 ans pour certains. Si le genre est principalement dominé par Marvel Studios/Disney, il serait bête de ne pas regarder ce qui se fait ailleurs. Rappelez-vous Sony Pictures avec la trilogie Spider-Man de Sam Raimi qui au début des années 2000 avait réussi à rendre le fan heureux et intéresser le non-lecteur. Doit-on encore mentionner les Batman de Tim Burton ou Christopher Nolan ? Batman et Spider-Man sont les héros de comics qui ont le droit au plus d’adaptation sur grand écran suivi de près par Superman. Mais avec plus d’une centaine de personnages de comics, il serait intéressant de laisser aussi briller les autres. Du moins essayer.
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Il n’est pas seulement question de plaire au lecteur de comics mais aussi à ceux qui n’y connaissent pas grand chose. Si Marvel se cantonne en très grande partie au public familial et aux fans, on peut mentionner ceux qui sortent du lot, comme les Deadpool réalisés par le feu studio de la Fox. Maintenant que Disney a racheté le renard doré d’Hollywood, il est probable que le Mercenaire à la grande gueule va être quelque peu censuré. Formaté d’une certaine manière, sauf quelques exceptions, le genre super-héros se ressemble de plus en plus, notamment du côté du Marvel Extended Universe. Après tout pourquoi changer une recette qui gagne ? Alors que les mâles ont dominé le genre et le box-office en général, c’est en 2017 que l’on a vu débarquer le premier film avec une super-héroïne en tête d’affiche, et pas n’importe laquelle. Wonder Woman interprétée par Gal Gadot, dont la première apparition dans le DCEU eut lieu un an plus  tôt dans Batman vs Superman: Dawn of the Justice de Zack Snyder. Outre le fait que c’était le premier film du genre avec une femme en  »leader », ce fut également le premier à être réalisé par une femme, Patty Jenkins (Monster). Voyant que le succès (et surtout l’argent) était là cela motiva la concurrence à faire de-même. Oui, après tout  »business is business » comme le dit Harley Quinn dans le film dont on va parler ci-dessous. C’est ainsi que Marvel Studios sortit Captain Marvel en 2019, et beaucoup trop tardivement Black Widow en solo prévu pour le mois de mars de cette année. Oui, les cocos vous loupez un peu le coche parce que Scarlett Johansson vous l’avez dans l’équipe des Avengers depuis le premier film datant de 2002, et encore je ne cite pas Iron Man 2 sorti deux ans plus tôt où l’espionne russe apparaissait déjà. Birds of Prey (et la Fantabuleuse histoire de Harley Quinn) des studios Warner/DC arrive lui 10 années après l’introduction de Natasha Romanoff chez le MCU, mais seulement 4 ans après les débuts de Harley Quinn dans Suicide Squad de David Ayer (Training Day, Fury). Alors peut-être que le DCEU est moins structuré – voir presque pas – en comparaison au MCU, mais au moins le premier (avec beaucoup d’insistance) braque le projecteur sur ces personnages féminins dont les origines méritent d’être racontées. Et attention, je ne suis ni pro Marvel ni pro DC, j’aime autant l’un que l’autre. C’est en tant que spectatrice et amoureuse des comics que je me prononce, notamment quand il s’agit de rendre justice aux personnages utilisés.

Birds of Prey (et la Fantabuleuse histoire de Harley Quinn) est réalisé par Cathy Yan dont c’est le premier film à gros budget, et que le deuxième hors courts-métrages. Le scénario est signé Christina Hodson avec entre autres Margot Robbie à la production. En plus d’être une des têtes du projet, Margot est aussi l’actrice qui joue Harley alias Harleen Frances Quinzel. Pour ceux qui ne le savent pas encore, le personnage créé par Paul Dini et Bruce Timm n’a pas fait ses débuts sur papier, mais sur petit écran dans la série animée Batman de 1992. C’est seulement grâce au succès auprès du public que Harley a été intégrée aux comics, dès 1993 dans The Batman Adventures #12. Inspirée par le personnage d’Arlequin issu de la ‘commedia dell’arte’ apparu au XVIème siècle en Italie, et d’une scène dans le soap opera Days of our Lives. Costume aux motifs de losanges multicolores, allusion au bouffon du roi, au théâtre et au clown. Très souvent connue comme étant la copine/ex-copine du Joker dont le couple est parfois vu comme mythique et romantique, il faut noter que la relation a de quoi faire frémir quand on y pense. Harleen, psychiatre de renom, tombe sous le charme de son patient le Joker enfermé à l’asile d’Arkham, jusqu’à en devenir follement amoureuse, allant même jusqu’à plonger dans une cuve de produits chimiques pour devenir comme lui. Dénigrée et parfois maltraitée par Monsieur J., Harleen a longtemps relevé du fantasme masculin, mais fort heureusement pas par tous. Et ce n’est pas ses premiers pas sur grand écran dans Suicide Squad (2016) qui a changé la donne. Démarche chaloupée avec de gros plan de caméra sur son popotin, et attitude de blonde écervelée, son image en a pris un coup. Et si les comics ne sont pas toujours joyeux, au moins on était loin de ce massacre. Mais c’est tout de même elle qui revient sur le devant en 2020, quelques mois après le Joker avec Joaquin Phoenix qui aura fait oublier le désastre de Jared Leto dans le même rôle.

Projet pitché à Warner par Margot Robbie durant le tournage de Suicide Squad, l’idée a mis pas mal de temps à séduire les producteurs. Et ce n’est que grâce à la persévérance de l’actrice et sa dévotion pour son personnage que finalement le projet est né. On peut aussi remercier les critiques à propos de l’interprétation de Leto en Joker, qui aura fini d’enterrer l’idée d’un film Joker & Harley Quinn. La narration de Birds of Prey se fait sur le point de vue de Harley, qui nous parle de sa nouvelle vie après sa rupture avec le Joker. Protégée jusqu’à présent par le respect et la peur qu’inspire le criminel, personne n’ose lui tenir tête ni la toucher. Mais quand elle décide d’annoncer au monde sa rupture, les choses vont vite se gâter puisque tout le monde veut avoir sa peau. En tentant de rester en vie, Harley découvre qu’elle n’est pas la seule à Gotham à vouloir s’émanciper. Le traitement de Harley est à des années de sa version Suicide Squad et paraît plus naturel. En voyant Margot Robbie évoluer sur l’écran on ne peut s’empêcher de voir l’incarnation des comics. À la fois dangereuse, drôle et innocente par ce côté enfant espiègle, Harley est touchante, réellement touchante. De la douleur de sa rupture à ses propres démons intérieurs, elle nous apparaît aussi parfaitement imparfaite et sensible que jamais. On la découvre maligne, intelligente et on apprécie de voir son côté Dr. Harleen Quinzel s’éveiller. Margot met du coeur et de l’âme dans son jeu. De ses larmes à ses rires, nous voyons tout le talent de l’actrice et à quel point elle a compris le personnage. Les autres actrices sont toutes aussi douées. Résultat de recherche d'images pour "harley quinn birds of prey"

Une Jurnee Smollett-Bell en Black Canary semblant prisonnière des démons de son passé et des mains du criminel Roman Sionis (Ewan McGregor) qui l’a retiré de la rue. Néanmoins, si on comprend que cela à avoir avec son pouvoir spécial de Canary et de sa mère – ancienne héroïne – le tout reste tout de même flou laissant ainsi une grande porte ouverte pour voir le personnage déployer complètement ses ailes dans une éventuelle suite. Contrairement à cette dernière, Huntress (Mary Elizabeth Winstead) bénéficie d’un traitement de ses origines en intégralité de manière succincte sans que cela ne paraisse précipité. C’est suffisant pour que l’on comprenne son esprit de vengeance. Ayant été élevé au sein d’un clan de mafieux, Helena est le total opposé d’une Harley ou d’une Dinah ce qui crée un décalage dans le groupe assez drôle et fluide. Cassandra Cain (Ella Jay Basco) est l’adolescente qui aurait pu être insupportable si cela n’avait pas été elle dans le rôle. À aucun moment elle ne tombe dans l’excès comme tout le reste du cast, d’ailleurs. Rosie Perez en détective Renee Montoya vient compléter l’ensemble avec une touche de maturité dû à son parcours. Le casting masculin important est réduit à McGregor qui joue un Black Mask convaincant aussi bien avec ou sans masque. Un côté Donald Trump dans son attitude est clairement présent, même si pour ma part ses différents costumes m’ont plus fait penser à un Elton John des années 80/90. Son homme de main Victor Zsasz (Chris Messia) apporte une folie aussi dérangeante que celle de son patron, dont la dynamique intime et manipulatrice intrigue à l’écran. L’alchimie au sein de cast est un élément important, et il est évident que tout le monde s’est bien entendu durant le tournage. Les échanges se font sans complexe, et il a beaucoup de proximités dans chaque camp.

Visuellement le film s’offre des couleurs vives mais pas aveuglantes. On a le côté fun, enfant et déjanté de Harley qui entre en conflit parfait avec son côté imprévisible et sombre. Que ce soit dans l’attitude ou dans le visuel, on sent que Harley peut faire autant de dégâts qu’un Joker, mais à sa manière. Les costumes conçus par Erin Benach (Neon Demon, Drive, A Star is Born) accompagnent l’univers pétillant de notre Roller Derby Girl. Par exemple, pour notre Quinn finit le shorty rouge et bleu en mode string de Suicide Squad qui laisse place à un simple short taille haute en jeans et un haut blanc griffé à son nom, une paire de bretelles tombante. Son costume de roller girl est un véritable petit bijou qui ne laisse nullement la place à la sexualisation du personnage. Une version féminine plus réaliste et simple qui va de pair avec le traitement actuel du personnage. Son côté Arlequin de Quinzell est très souvent rappelé sur de nombreux accessoires : le pantalon en boîte de nuit, les petits motifs à losanges, etc… Black Canary et son pantalon doré qui lui va comme un gant, la panoplie de chasseresse de Helena et sa moto, le côté détective classique de Montoya.

La bande-son a été spécialement conçues par des artistes féminines. De chansons originales à des reprises, les différentes chanteuses s’appliquent à imposer un style cohérent. Le tempo est rapide, déchaîné, puis une scène plus loin c’est Jurnee Smollett-Bell qui nous fait fondre avec sa voix en reprenant It’s a Man’s, Man’s, Man’s World de James Brown.

En conclusion, Birds of Prey (et la Fabuleuse histoire de Harley Quinn) offre un très bon moment de divertissement avec un message clair et net sur l’importance de l’affranchissement des femmes quand les relations patriarcales deviennent toxiques. Certains estiment que le message est trop bourrin en tapant sur les hommes et la domination qu’ils peuvent exercer au jour le jour, aussi bien dans le personnel que dans le professionnel. Néanmoins, le spectateur le plus attentif gardera à l’esprit que ce genre de comportement est souvent engendré par la société elle-même et non par la simple motivation intérieure de l’individu mâle. Plusieurs niveau de lecture pour un film qui se démarque aussi bien par sa réalisation, ses scènes d’action chorégraphiées minutieusement, que par le fun et le sérieux des personnages. Harley brille par sa folie et ses émotions à fleur de peau que Margot Robbie embrasse pleinement.

 

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