Depuis sa création dans les années 40, Batman a évolué dans divers genres alliant le polar, la science-fiction, l’occulte et le fantastique. Dans ce crossover réunissant de nombreuses séries issues du Batverse, les auteurs se concentrent plus sur l’homme derrière le masque, Bruce Wayne, que sur le Chavalier Noir. Accusé d’un meurtre que tout accuse, Bruce se retrouver enfermer et sans la capacité de décider de son destin. La Batfamily va alors entrer en scène et tenter d’innocenter celui qu’ils considèrent comme un mentor. Une enquête haletante que Ed Brubaker, Chuck Dixon et Greg Rucka mènent avec une facilité incroyable.
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Ce premier tome de Batman : Meurtrier & Fugitf réunit le premier arc d’un crossover datant des années 2000 comprenant Batman, Bruce Wayne : Murderer ?. La suite intitulée Batman, Bruce Wayne : Fugitive sera publiée prochainement en deux tomes chez Urban Comics. Dans ce début de crossover donc, on retrouve des auteurs emblématiques de DC Comics (ou des comics en général) à savoir Greg Rucka (Wonder Woman, Lazarus, Black Magick, The Punisher), Chuck Dixon ( Nightwing – mon avis ici -, Robin, Green Arrow), Ed Brubaker (Catwoman, Captain America, Daredevil, Fatale), Devin Grayson (Nightwing, The Titans), et Kelley Puckett (Batgirl). Pour ceux qui soucient de la timeline ce récit est à lire après No Man’s Land, le one-shot President Lex et New Gotham. Mais il est important de signaler que vous pouvez lire ce crossover-ci sans rien connaître des événements passés, puisque cela est compréhensible et au cas où l’édito d’Urban Comics replace bien le contexte.
Pour résumer l’histoire on retrouve un Batman accompagné d’une nouvelle « presque sidekick » en la personne de Sacha Bordeaux, garde du corps de Bruce Wayne le jour, ayant découvert l’identité secrète du playboy arpentant les rues de Gotham en costume de justicier. Un soir, alors qu’ils rentrent de patrouille, Bruce découvre avec effroi le corps sans vie de son ancienne petite amie Vesper Fairchild, journaliste, avec qui il a rompu il a peu sans donner d’explication. Le hic est que tout porte à croire que c’est Bruce lui-même qui l’aurait tué de trois balles et que Sacha l’aurait couvert. Avertie par un coup de fil, la police débarque au manoir quelques instants plus tard, ne pouvant que croire en ce qu’ils ont sous les yeux, surtout qu’aucun des deux ne peut fournir d’alibi sans compromettre l’identité secrète de Bruce. Débute alors une enquête qui verra la Batfamily s’investir pour sortir leur mentor de prison, alors même que ce dernier veut se débrouiller seul.
Le premier point positif de ce récit est que l’on voit les différents membres de la Batfamily (mais pas que) défiler dans les pages. D’Oracle/Barbara Gordon à Black Canary, en passant par Nightwing, Robin et Blue Beetle, la galerie des personnages fait vraiment plaisir. Au fil des numéros, chacun d’eux verra sa confiance en Batman tester, certains douteront et y verront une fissure dans la psyché de Bruce commencée lors du meurtre de ses parents durant son enfance, alors que d’autres ne le croiront pas responsable. Le lecteur lui, se doute bien qu’à la fin le nom de Bruce Wayne sera blanchi mais on ne peut qu’apprécier le fait de voir un Batman complémentent absent et un Bruce se refermant sur lui-même. Apparaissant plus sombre que jamais, ce dernier ne laisse que peu d’ouverture pour que la police et les médias ne le croient innocent. Greg Rucka et les autres mettent plutôt l’accent sur l’homme derrière le masque et sur la vision que la population peut se faire de lui. Étant toujours apparu comme un homme à femmes, chef d’une entreprise pesant des milliards, discret et excentrique à la fois, chacun ira de son mot bien corsé sur l’homme. Dick Grayson/Nightwing possède le meilleur développement selon moi, ainsi qu’Alfred Pennyowrth toujours là pour faire au mieux pour aider Maître Bruce. Le lien unissant ce trio est bien retranscrit et plaît énormément à la lecture.
Derrière les barreaux de la prison de Gotham, Bruce et Sacha se doivent de prendre leur mal en patience. Si Bruce nous est toujours apparu comme quelqu’un possédant un sang froid inébranlable, ici, sa capacité à tenir et à faire abstraction du malheur qui le touche sera difficile. Sacha fait ce qu’elle peut dans sa cellule. La psychologie de cette dernière sera d’ailleurs manipulée par les forces de l’ordre tentant de la faire craquer durant les interrogatoires. On sent très vite l’incertitude s’immiscer en elle, surtout que rien n’empêche les avocats de Wayne de l’accuser elle pour sauver leur client. Et puis, elle pourrait très bien se sortir de là en dévoilant le secret de Bruce, non ?
L’ambiance policière est un autre point positif, puisqu’il est rafraîchissant de voir des auteurs se concentrer avant tout sur le côté détective du personnage. En effet, à ses débuts dans Detective Comics, le Chavalier Noir n’était confronté qu’à des enquêtes de vols, trafic de la pègre de Gotham, etc., avant de finalement toucher au fantastique en affrontant Darkseid et compagnie avec la Justice League. Les combats sont donc moins nombreux, puisque c’est avant tout une enquête pour sauver la peau de Bruce et de Sacha. Ce tome pose les piliers du crossover, et est donc moins porté sur l’action. Cette atmosphère m’a rappelé l’un de mes runs préférés sur Batman de Paul Dini présente Batman (publié en trois tomes chez Urban – mon avis ici et ici). La tension instaurée par le questionnement autour de l’état mental de Bruce apporte une tension palpable, et arrive même à instaurer le doute dans l’esprit du lecteur… Notre fin détective a-t-il été piégé, et si oui par qui et pourquoi ? Ou a-t-il définitivement grillé un fusible ? On se doute de la machination mais on a clairement envie de connaître les raisons ! Le dernier tiers du tome relance le récit en explorant encore plus en détail la caractérisation de Bruce orchestré par Ed Brubaker (Batman #599), qui comme souvent prouve que le milieu du polar lui sied comme un gant. Toutefois, comme souvent le fait que ce soit un crossover voyant diverses séries se rejoindre à un point de convergence donne lieu à quelques défauts. La narration, par exemple, donne l’impression de faire du surplace. Les auteurs continueront aussi à faire avancer en annexe les intrigues propre à leurs personnage comme Robin/Tim Drake qui est totalement déconnectée du récit.
La partie graphique est assurée par de nombreux dessinateurs (Rick Burchett, Scott McDaniel, Damion Scott, Trevor McCarthy, Roger Robinson, Rick Leonardi, Pete Woods, Steve Lieber). À la lecture la cohérence entre le style est assez complémentaire et ne souffre pas de grandes différences dans les traits. Parfois, certains ont la main un peu lourde sur le trait noir et le manque de nuances sur les visages se fait sentir, mais sinon rien de méchant. Alors, oui, il est conseillé de le feuilleter avant puisque l’on est ici dans un récit se déroulant au début des années 2000 et que la patte graphique des années 90 n’est pas encore très loin. L’édition d’Urban Comics ne présente aucun défaut. La traduction d’Alex Nikolavitch est plus que correcte. Le papier est soigné, l’encre ne bave pas, et nous avons comme toujours en début de tome la timeline de publication et une description rapide des personnages présents.
En conclusion, ce tome 1 de Batman : Meurtrier & Fugitif est une lecture menée par une clique d’auteurs connaissant fort bien l’univers de la Chauve-Souris de Gotham. Maniant la tension propre au récit de polar d’une plume fine et prenante, l’amateur de ce genre sera conquis. Psychologie bien écrite, rythme montant en crescendo, galerie de personnages intéressants et reconnaissables, les récits de Batman sont nombreux mais ceux traitant de la mince frontière entre Bruce Wayne et son alter égo sont assez rares. Vivement la suite !