Critique manga #142 – Moriarty tome 1

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En 1887, l’auteur Arthur Conan Doyle donnait naissance à son personnage de fiction Sherlock Holmes, devenu une légende et référence aussi bien dans la littérature qu’au cinéma ou à la télévision. Face à lui, dans l’ombre et souvent mal compris se trouve Moriarty. Personnage occupant la place de Professeur à l’intelligence souvent supérieure à celle de Holmes, ce dernier avouant facilement qu’il est impressionné par Moriarty. Avec le temps, James Moriarty est devenu l’un des sociopathes les plus redoutables et rusés. Mais comment est-il devenu ainsi, et pourquoi ? C’est que cette adaptation en manga d’après et inspirée par l’oeuvre de Conan Dolye vous propose de découvrir.
Acheter le tome 1 de Moriarty sur le site des éditions KANA ou sur Amazon
Également disponible en numérique sur izneo

 

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kanadargaudsuisse

Voilà bien une lecture élémentaire mes chères Stéphanie et Anne-Catherine

Je vous invite à lire la chronique de mon camarade Esprit Otaku ici, à l’analyse pertinente

Derrière le scénario de Moriarty se trouve Ryosuke TAKEUCHI, connu pour deux autres travaux en France : ST&RS (2011), et All You Need Is Kill (2014) qui donna naissance au film Edge of Tomorrow avec Tom Cruise. Moriarty ou Yukoku no Moriarty en VO a débuté sa pré-publication en 2016 dans les pages du Jump SQ de la Shueisha, avec 5 tomes en cours. Il est inspiré de l’oeuvre originale Les Aventures de Sherlock Holmes par Arthur Conan Doyle, que l’on ne présente vraiment plus. Le dessin est assuré par Hikaru MIYOSHI, l’artiste de l’adaptation manga de la saison 1 de Psycho-Pass, centré sur l’Inspecteur Akane Tsunemori chez Kana en 6 tomes. Pré-titré dans un premier temps Moriarty the Patiot, c’est finalement sous le simple (mais suffisant) Moriarty que le manga voit le jour aux Éditions Kana dans la collection Dark Kana.

Ce premier tome est disponible dans une version collector comprenant un fourreau pour ranger son manga, ainsi que d’un set de correspondance au prix de 9.90 €. De plus, je vous invite à vous renseigner auprès de votre libraire pour voir s’il participe à l’offre d’un stylo tout en élégance offert à l’achat du tome.

Pour ceux n’ayant jamais lu les romans Sherlock Holmes, c’est possible oui, il vous faut simplement savoir que Moriarty est présenté comme le vilain de l’histoire et Sherlock comme le pus grand détective du monde œuvrant pour le bien. Le Professeur Moriarty apparaît pour la première fois dans Le Dernier problème publié en 1893, une nouvelle où Holmes tente de porter un coup fatal à l’organisation criminelle que dirige le Professeur. Par ailleurs, je vous conseille fortement la lecture du roman Moriarty : Le Chien des d’Uberville par Kim Newman [ma critique].

Le tome s’ouvre sur Le Napoléon du crime (son surnom) suspendu au-dessus des chutes de Reichenbach (en Suisse) qui le voit déclarer à Holmes, tentant de l’empêcher de tomber : ‘Non, je ne fais pas erreur. Le démon, c’est toi !! C’est toi, Sherlock !!’. Cette ellipse temporelle laisse ensuite place à l’enfance de William James Moriarty, dans l’Angleterre de 1866, à Londres. Là-bas nous faisons la connaissance de la famille Moriarty, l’une des familles les plus nobles et fortunés du pays, avec pour fils aîné Albert. À la demande de celui-ci, ses parents adoptent deux orphelins, William et Louis. Parce que la mentalité de “noblesse oblige” fait que les plus riches se doivent de tendre la main aux plus démunis afin de toujours paraître comme « bienveillant » et « distingués ». Pourtant malgré les apparences, les deux frères ne sont pas dorlotés et choyés comme un enfant devrait l’être. Au contraire, ils sont méprisés non seulement par leurs parents d’adoption, mais aussi par les domestiques. Sauf par Albert, qui voit ses deux nouveaux frères comme quelque chose de positif. En réalité, Albert est rongé par l’envie de bousculer les codes de la hiérarchie sociale qui domine l’Empire Britannique, voyant les plus riches toujours plus riches, et les pauvres toujours plus pauvres et exploités par les nobles. Pour y arriver, Albert va trouver un stratagème des plus efficaces : éliminer ses parents et son petit frère, et faire des deux orphelins ses frères de sang.

Il faut dire que William est un véritable petit génie adorant aider son prochain tout en vouant une haine à la caste la plus haute dans l’échelle sociale. Talentueux, séduisant et intelligent sont les trois adjectifs principaux pour décrire le petit William. Après quelques pages imaginant son enfance, le lecteur le découvre une dizaine d’années plus tard occupant un poste de professeur à l’université de Durham, et celui de consultant privé. Dans ce premier tome la narration suit un schéma linéaire présentant donc la jeunesse fictive du personnage, qui de fil en aiguille se voit enrichie par toute la dimension sociale qu’offre l’époque. En étant témoin depuis toujours de la violence et de l’injustice, les trois frères Moriarty usent de leur richesse et titre de noblesse pour infliger une correction aux plus fortunés ne pensant qu’à profiter de ceux des “rangs inférieurs”. Pour nous expliquer cela, TAKEUCHI prend le temps de créer des affaires ou missions que William et co. vont résoudre.

Selon moi William a beau commettre des crimes, dont des meurtres, il n’est pas qu’un simple vilain puisqu’il est le antihéros que l’on retrouve dans de nombreuses autres œuvres de fiction. Mais sous ce chapeau de futur ennemi de Holmes, le personnage est façonné par une vraie motivation et non pas par simple envie de “détruire le monde” ou de “le conquérir” parce c’est ce qu’un “vilain doit faire”. Non, il est pour ainsi dire un « justicier » malgré ses tendances meurtrières et quelque peut dominatrices. La psychologie du personnage est sombre mais délicieuse à découvrir, et le traitement apporté à Albert, Louis, criminels et victimes est exquis. Sur de nombreux aspects, Moriarty se rapproche de Psycho-Pass, que ce soit au niveau du background sociétal que de la profondeur des protagonistes. Tout comme dans cette franchise, la frontière entre les méchants et les gentils est très mince, puisque au final on ne peut s’empêcher de partager la vision des Moriarty. Et si ces derniers portent l’étiquette de vilains, on est frappés par ce qui ne tourne pas rond dans l’Empire. Plusieurs questions nous viennent alors à l’esprit : Quelle est la véritable définition du bien et du mal ? Si la justice n’est applicable qu’à ceux qui ne peuvent corrompre par des pots de vin, ne devrait-on pas faire justice soi-même ? On peut ainsi découvrir tout l’intellect subtil de William et le malin plaisir qu’il éprouve à rétablir l’ordre qu’il estime être le bon. Dans l’ensemble cela fonctionne très bien même si une pointe de répétition se fait sentir ici et là. Mais on peut déjà parier sur un changement dans les tomes suivants, puisque dès la fin du tome nous découvrons de nouveaux personnages : le Colonel Molan alias Sebastian Moran dans l’oeuvre d’origine.

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Le dessin de Hikaru MIYOSHI épouse habilement la psyché toute en charme des frères Moriarty, insistant sur le fait que William est le plus séduisant, tel un serpent venant tenter Eve dans son jardin. Ceux qui avaient déjà été conquis par le trait fin du mangaka dans Psycho-Pass Inspecteur Akane Tsunemori seront heureux de le retrouver. Le jeu sur les regards créé une immersion totale du lecteur qui reste scotché face à la malice dans les yeux de William. Si j’insiste tant sur lui, c’est parce qu’il est réellement le pilier de l’équipe qui se forme petit à petit. L’atmosphère du Londres du XIXème siècle et son style victorien sont extrêmement bien retranscrits, avec une mise en avant de la différence entre la ville et la campagne de Durham. Le tout est fluide, précis et envoûtant.

Rien à dire sur le travail d’édition de Kana concernant le tome simple puisque même en enlevant la superbe jaquette, nous avons un bouquin travaillé. La traduction de Patrick Honnoré est excellente et en accord total avec l’époque du récit. Pour ce qui est de la version collector, nous avons un fourreau au design rappelant les livres anciens et classiques, avec une partie pour ranger le tome, et de l’autre côté un set de correspondance de style victorien soigné et magnifique. Et franchement si on devait les utiliser ce serait pour écrire à la famille Royale d’Angleterre.

En conclusion, ce tome 1 de Moriarty est à prendre comme une introduction à un univers inspiré des écrits intemporels de Conan Doyle, voyant Ryosuke TAKEUCHI y insuffler sa vision du personnage sans dénigrer la source. Le tout est écrit avec sérieux et dynamisme mettant en lumière toute la complexité du personnage de William, appuyé par le charisme de ses frères. Une lecture qui ravira aussi bien les fans que les nouveaux souhaitant découvrir un mythe à l’ambiance efficace promettant de bien belles surprises à venir !17blancinfos manga

 

 

14 réflexions sur “Critique manga #142 – Moriarty tome 1

  1. J’attendais avec impatience ton avis sur ce tome… et voilà qui va encore faire mal à mon porte-monnaie, même si je pense me contenter de la version simple, car la collector à l’air un peu superficielle, par rapport à la différence de prix, contrairement à L’atelier des sorciers et son artbook… Dis moi si je me trompe 😉

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    • ahaha je suis désolée ?
      Les deux versions collector ne sont pas comparable c’est certains. Mais moi qui aime bien ces petits trucs d’écriture (j’ai deja un set que je n’utilise jamais et ça fait bien 15 ans que je l’ai!)
      Reviens me dire ce que tu en as pensé ensuite !

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      • Je l’ai acheté en version simple hier et lu dans la journée… et je dois avouer que je suis mitigée. Je vais prendre un peu de recul et peut-être le relire avant d’écrire ma chronique.

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  2. Ah, si j’avais su pour le stylo, j’aurais demandé !
    Très belle chronique comme d’habitude sinon. Merci pour toutes les références que tu glisses, ça éclaire bien des choses ^^

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  3. Celui-ci va sûrement pas tarder non plus à rejoindre ma pal!! J’aime beaucoup les illustrations en tout cas! J’aime bien quand « la frontière entre les méchants et les gentils est très mince » pour reprendre tes mots donc je pense que ça va le faire!^^

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